Vous êtes forcément au
courant : depuis un mois se tient dans toute la France le débat sur la transition énergétique.
L’occasion pour notre gouvernement de consulter l’ensemble des citoyens, afin
de : « débattre sur ces principales questions : Quelle énergie
dans 10, 20, 30 ou 40 ans ? Quels sont les investissements nécessaires
aujourd’hui ? Comment développer les énergies renouvelables ? Comment
optimiser au maximum nos consommations, utiliser au mieux l’énergie
disponible ? ». Cette consultation doit aboutir à un projet de
loi de programmation en octobre 2013. Electrisant, non ?
S’il y a des questions sur lesquelles une consultation nationale
est utile, je ne suis pas convaincu que ce soit le cas de notre politique
énergétique.
D’autant que les grandes lignes sont déjà largement tracées.
Le Gouvernement s’est engagé à sortir progressivement du
nucléaire en réduisant sa part dans la production d’énergie, de 75% à 50% d’ici
2025. Il a déjà annoncé la fermeture du site de Fessenheim.
Par ailleurs, une directive européenne sur l’efficacité énergétique fixe déjà le cadre global. D’ici 2020 nous devons accroître de 20% notre efficacité
énergétique (la directive fixant même un plafond de consommation globale), limiter
de 20% nos émissions de gaz à effet de serre, porter à 20% la part des énergies
renouvelables dans nos consommations…
Au passage nous réaliserons aussi et en même temps l’exploit de
réduire nos importations d’énergies fossiles. Formidable !
Nos institutions, nationales et européennes, négligent
simplement un fait simple : les questions d’énergie relèvent d’avantage des
lois de la physique que des décisions politiques.
D’ailleurs le débat est à peine entamé que les bonnes nouvelles
arrivent. La dépêche est tombée hier: la
facture d’électricité des ménages devrait augmenter de 30% d’ici 2017.
Bien sur c’est une
projection. Mais elle a de grandes chances de se réaliser. D’autant qu’il
s’agit sans doute d’une estimation à la baisse : un rapport du Sénat
indique une hausse de 50% d’ici 2020.
L’électricité française est actuellement une des moins chère d’Europe. Il n’y a pas de raison que ça dure. Les ménages ont bien entendu l’occasion d’en débattre autant qu’ils le souhaitent.
Sortir progressivement du
nucléaire comme le veut le chef de l'Etat tout en maintenant la
production (grâce au charbon ?) et en intégrant des énergies renouvelables
au réseau va coûter très cher (en admettant que ce soit réalisable sans augmenter les importations d'hydrocarbures). Le simple déploiement de Linky, le compteur
intelligent à partir duquel se construiront les Smarts Grids, est estimé à au
moins 4 milliards d'euros pour le remplacement de 35 millions de compteurs
d’ici 2020. Et le compteur est une goutte d’eau dans le dispositif.
Enfin le monde physique a
fâcheusement tendance à ne pas suivre les consignes et les directives.
Les énergies fossiles qui
servent aussi à la production électrique (environ deux tiers de l’électricité
au niveau mondial, 10 % en France) ne sont pas en quantité infinie. Pour certains nous aurions déjà atteint le
« Peak Oil», le moment où la production décline du fait de
l’insuffisance des réserves et de l’accroissement de la demande. Sur cette
question je vous renvoie à l’excellent blog de mon confrère Matthieu Auzzaneau.
Les prix des hydrocarbures
vont continuer à augmenter (le cours moyen annuel du baril de Brent est passé de 19$ en 1992 à 111,66$ en 2012). Pour achever de vous convaincre (au cas où
vous ne seriez pas automobiliste), je vous recommande deux vidéos : la
présentation faite par Christophe de Margerie, PDG de Total, à la Commission des Finances en
2008, et l’exposé fait il y a quelques jours à nos députés par Jean-Marc
Jancovici.
C’est un peu long, mais édifiant. Ce
dernier annonce tout simplement la fin du monde de l’énergie abondante et à bon
marché. Avec pour corollaire la fin de la croissance en Europe. A la différence
des Témoins de Jéhovah, Jancovici démontre ce qu’il promet. Et il a de
l’humour.
Ceux qui souhaitent connaître
ses arguments peuvent s’en resservir une louche sur son blog.
D’après le rapport 2012 de l’Agence internationale de l’énergie, la demande mondiale en électricité augmente
presque deux fois plus vite que la consommation totale d'énergie. La consommation électrique
dans le monde devrait augmenter de 70 % d’ici 2035. Malgré nos débats nationaux
et nos directives européennes.
Avec
une demande de plus en plus forte confrontée à une offre de plus en plus en plus
contrainte, je ne vois pas comment nos factures d’électricité ne s’envoleraient
pas.
D'autant que la
hausse des prix va sans doute être amplifiée par nos chers (très chers) politiques au moyen de
taxes : c’est en effet le moyen le
plus éprouvé pour obtenir des utilisateurs une réduction de leurs
consommations. Baisse de consommation exigée
par nos engagements internationaux et la lutte contre le changement climatique
certes, mais aussi et surtout par les lois de la géophysique et la moindre
disponibilité des ressources.
On
peut débattre à l’envie de la transition énergétique : avec une hausse de
30 à 50% du prix de l’électricité, elle ne va pas se faire sans douleur !
Mais
on peut toujours causer…