mercredi 12 juin 2013

Sauvez les pioupious !




Gouverner est un art subtil. Han Fei Zi ou Machiavel ont largement glosé sur la question. Mais cette subtilité est telle que parfois elle m’échappe totalement.

Ainsi par exemple de deux décisions récentes de notre gouvernement : la reforme du statut des auto-entrepreneur (en le limitant dans le temps et dans le chiffre d’affaires : ici) et celle du congé parental (diminution de sa durée de trois ans à deux ans et demi pour le premier parent et obligation pour le second parent de prendre six mois ou de le perdre : , troisième partie, p.18).

Ces deux réformes s’apparentent par de nombreux aspects.
Elles vont mécontenter plus d’un million de français.
Elles ne vont pas rapporter un centime.
Elles ne vont améliorer la vie de personne.
Elles ne vont pas créer d’emploi.

On compte près de 830 000 auto-entrepreneurs qui paient en moyenne 23% de taxes et cotisations sur les 5 milliards d’euros de chiffre d’affaires qu’ils représentaient en août 2012. Baisser leur plafond de chiffre d’activités c’est réduire, sinon tarir cette manne. Et priver tout ce petit monde d'activité. Pour quel bénéfice ? Les lobbies d’artisans qui se plaignent d’une concurrence déloyale n’avancent aucune donnée. Un rapport de l’Inspection Générale des Finances et de l’Inspection Générale des Affaires Sociales, commandé par le gouvernement, plaide au contraire pour un maintien de ce statut «Au terme de ses investigations sur le régime, il est apparu à la mission délicat et même inopportun de bouleverser ce régime qui est en train de parvenir à maturité et de s’inscrire dans le paysage économique de notre pays.(...)Le cadre fiscal et social (…) doit être maintenu pour assurer aux AE et aux porteurs de projet une visibilité, qui a souvent été défaillante, sur le cadre de leur action» conclut sans équivoque ce rapport.

La France est championne d’Europe de la natalité. On y compte environ 800 000 naissances par an. Réduire le congé parental c’est prendre le risque de faire 1,6 millions de mécontents (en considérant deux parents par naissance, ce qui semble une moyenne correcte). Si la diminution des prestations familiales va rapporter un peu d’argent à l’Etat (une forme inédite d’impôt sur l’enfant), la réduction du congé parental ne vas pas rapporter un fifrelin au Trésor Public, ce congé étant à la charge des entreprises.

Perso, si je ne compte pas bénéficier bientôt du congé parental, je suis directement affecté par la réforme du statut d’auto-entrepreneur. Le plafond actuel de chiffre d'affaires de 32 600 € me laisse espérer développer mes activités éditoriales pour atteindre un revenu mensuel de 2078 euros après cotisations (depuis janvier la bien-nommée URSSAF a augmenté ses ponctions de 3%, j’ai désormais l'honneur de lui reverser à peu près le quart de mes gains). Après la réforme je devrai veiller à ne pas gagner annuellement plus de 19 000 €, soit un salaire mensuel de 1211 €  (si les ponctions n’augmentent pas, ce dont je doute). Me voilà donc avec pour seul espoir un Smic pour compléter le maigre revenu avec lequel je nourris ma famille. Chouette perspective d’avenir !

Je voudrai bien comprendre quel intérêt notre gouvernement trouve à faire plus d’un million de mécontents en se mettant à dos futurs parents et auto-entrepreneurs ? L’avantage d’entraver les femmes qui ont choisi de  travailler et d’avoir des enfants ? Le bénéfice de saper l’entreprenariat balbutiant ?

Dans l’espoir inouï que le bon sens triomphe, je joins ma voix à celles des deux catégories de poussins visées, les bébés pigeons et les bébés tout court :  http://www.defensepoussins.fr et http://www.change.org/fr/pétitions/congé-parental-non-au-projet-de-loi-2013-de-najatvb